10 000 ans d’histoire de la pollution atmosphérique en cuivre, mercure, antimoine et plomb enregistrés dans les sédiments d’un lac d’origine glaciaire

Prélèvements sur le lac Robert à Chamrouse.
© Pierre Sabatier, EDYTEM
L’étude des sédiments déposés dans le Lac Robert (Chamrousse, Massif de Belledonne, Alpes) a permis à une équipe de chercheurs français [1], dont des scientifique d’ISTerre / OSUG, de reconstituer l’historique de la pollution atmosphérique dans cette région sur les 10 000 dernières années. Il s’avère que l’activité minière dans le massif des Grandes Rousses (Alpes d’Huez) durant l’âge de Bronze, il y a environ 2 500 ans, a induit une pollution atmosphérique en mercure et antimoine équivalente à celle observée aujourd’hui. Cette pollution a été limitée géographiquement, mais elle a persisté pendant plus de 2000 ans.


Une pollution atmosphérique en plomb à l’échelle de l’hémisphère Nord a été générée durant l’Empire Romain par l’exploitation des mines du Rio Tinto en Andalousie, comme de nombreuses études menées dans les glaces polaires et les sédiment lacustres l’ont mis en évidence.

Afin de reconstituer l’histoire de la pollution atmosphérique en cuivre, mercure, antimoine et plomb dans les Alpes, des chercheurs des laboratoires Hydrosciences Montpellier, ISTerre, EDYTEM et LCME ont prélevé deux carottes de sédiments lacustres, dans le lac Robert situé à 2000 m d’altitude sur le domaine de la station Chamrousse, qu’ils ont datées au carbone 14. Ces carottes avaient enregistré 10 000 ans d’apport sédimentaires qui mettent en évidence de nombreux changements environnementaux (climatiques, pédologiques, sédimentologiques et atmosphériques) d’origine naturelle ou liés aux activités humaines.

En ce qui concerne la pollution atmosphérique, les chercheurs ont identifié 4 périodes de pollution : l’Âge de Bronze (1800-1000 av. J.-C.), l’Âge de Fer et l’Empire Romain (800 av.J.-C.-1000 après J.-C.), le Moyen-Âge 500-1500 après J.-C.) et les époques modernes et industrielles (1500-2000 après J.-C.).
Le résultat le plus marquant, nouveau et inattendu, est la mise en évidence d’une pollution atmosphérique importante - équivalente à celle d’aujourd’hui - en mercure et antimoine durant l’âge de bronze. Cette pollution était due à l’exploitation de gisements de cuivre (chalcopyrite) riches en mercure et antimoine dans le massif des Grandes Rousses (Alpes d’Huez).
Cette activité minière connue des archéologues a généré une pollution limitée géographiquement contrairement aux activités plus récentes qui ont induit des pollutions régionales (époques Romaines ou médiévales) et globales (période actuelle). Cependant, bien que limitée géographiquement, cette pollution en mercure et antimoine s’est révélée persistante, visible sur plus de 2000 ans dans les sédiments des lacs aux alentours.

Enrichissements (EF) des concentrations en cuivre, antimoine, mercure et plomb par rapport aux concentrations préindustrielles des sédiments du lac Robert, taux d’accumulation (ART) en fonction de l’âge des sédiments et variations du rapport isotopique stable du Pb (206Pb/207Pb) permettant de retracer l’origine de la pollution.

***Référence

A 10,000-year record of trace metal and metalloid (Cu, Hg, Sb, Pb) deposition in a western Alpine lake (Lake Robert, France) : Deciphering local and regional mining contamination, Elbaz-Poulichet et al., 2020, Quaternary Science Reviews, 228 (2020)
DOI

***Contact scientifique

 Françoise Elbaz-Poulichet I HSM / OREME

► Cet article a initialement été publié par le CNRS INSU.

Publié le 6 janvier 2020

[1Les laboratoires impliqués étaient les suivants : le laboratoire Hydrosciences Montpellier (HSM/OREME, CNRS / Université de Montpellier / IRD), l’Institut des sciences de la Terre (ISTerre/OSUG, CNRS / UGA / IRD / IFSTTAR / USMB), le laboratoire Environnements, dynamiques et territoires de la montagne (EDYTEM, USMB / CNRS / Ministère de la culture) et le Laboratoire de chimie moléculaire et environnement (LCME, USMB).